Josette, espionne rousse du réel, au bord de la mer.






« Çà y est, les touristes sont arrivés ! se disait Josette, l'espionne rousse du réel, en voyant des hordes de personnes en short et tongs pousser des caddies débordant à l'hypermarché » Cela faisait près d'un mois que l'eau du robinet puait le chlore mais la foule n'y était pas. Mais les voilà, à acheter des fours et des casseroles qui manquent dans leurs locations, à se croire enfin sortis de la ville alors qu'ils la trimballent avec eux, dans leurs têtes et leurs habitudes. « Les voilà, les toutous, les voilà, les touristes ! » Il devenait alors difficile de trouver dans les kiosques le journal papier LIBÉRATION qui avait peut-être opté pour une stratégie écoresponsable en imprimant moins de papier, donc moins de journaux, bref josette avait acheté le journal LE MONDE. Josette avait toujours vu son propre père lire ce journal, et sans doute à la fin de sa vie faire semblant de le lire, qu'elle ne pouvait s'empêcher d'associer ce journal à celui-ci. Elle se rappelait même avoir reçu un jour, par courrier, un article que son père avait découpé dans le journal LE MONDE au sujet de la chorégraphe Odile DUBOC avec laquelle à l'époque Josette travaillait, bon l'article était signé Sylvie DE NUSSAC et disait n'importe quoi, mais cette tentative de son père de lui faire signe au travers de sa lecture quotidienne du monde par LE MONDE l'avait presqu'émue. .
Force était de constater qu'en cet été 2018 du mois d'août, nous étions loin de la ligne protestante rigoriste du fondateur Hubert BEUVE-MéRY : du texte, rien que du texte, mais aussi des images et des illustrations, ainsi que des articles nous racontant les pratiques sociales en vogue, enfin pour ceux et celles qui croiraient ce que peuvent dire les journalistes et les bureaux de tendances sur ces sujets plutôt protéiformes et mouvants. … S'il était possible en lisant le journal LIBÉRATION de continuer à l'âge de cinquante ans une trajectoire postado vers la loose fondamentale sans trop se poser de questions, la lecture du journal LE MONDE en ce jour d'été 2018 rappelait à Josette qu'il existait un autre monde, celui des gens biens et sérieux, qui font carrière, gagnent de l'argent qu'il s'agit de placer au mieux, vivent en couple tout en réfléchissant à l'amour et à l'avenir scolaire et social de leurs enfants, etc... des gens biens et sérieux dans un monde de dingues, bien sûr, mais des gens biens et sérieux dans un monde qui ne leur paraît dingue qu'en ce qu'il ne ne les concernerait pas car ils sont des gens biens et sérieux. Toto a dit tautologie et jacadi a dit jacquerie ! Bref, en cet été 2018 du mois d'août, Josette ne se perçut plus du tout telle une lectrice type du journal LE MONDE. Josette ne se perçut plus du tout comme lisant des nouvelles du monde que lisait son père en lisant le journal LE MONDE. Ainsi Josette avait lu la playlist des chansons d'amour égrénée par Valérie PECRESSE, présidente du conseil Régional d'Ile-de-France. Ainsi, Josette avait lu « aux Etats-unis, l'amour en prenant « date » », article se présentant comme le premier d'une série de six dédiée aux « nouveaux codes amoureux » ce que Josette avait traduit automatiquement par  « les nouvelles pratiques des précieuses ridicules et de leur précieux». Mais Josette, quoiqu'espionne du réel, pouvait se tromper. L'article était illustré par un dessin représentant un jeune homme et une jeune femme tentant une approche l'un vers l'autre par les mains et les doigts, tendance Dieu et Adam dans la fresque de Michel Ange que le pape voit chaque matin au plafond de sa chapelle. Dans ce dessin réalisé par une femme, le jeune homme avait l'air terriblement niais et ne faisait pas du tout envie. D'après Josette. A Josette, espionne rousse du réel. Des goûts et des couleurs. Dégouts et des coups leurres. « Aux Etats-Unis, on se rencontre rarement par hasard. On prend date », disait l'article en son commencement. «  çà commence fort !, se disait Josette qui pensa alors au couple CAGE-CUNNINGHAM : qu'auraient donc pensé ces deux géants si quelqu'un leur avait dit de leurs vivants que des êtres humains au début du XXIe siècle cherchaient à se débarrasser du hasard, leur dieu, leur tiers, « i just do it by chance » ? « would you mean that the freak control win the war ? It would be a nightmare ! i can't believe that could happen. » « C'est vrai, Ce n'est jamais fini... », se disait Josette, rassurée.
(à suivre)



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