Les mystères familiaux.


La mère de notre mère avait des traces sur les jambes. Elle nous avait raconté que c’était parce qu’une fois alors qu’elle était en Tunisie (Agadir ou Byzerte ?) elle avait mis les pieds dans une casserole d’eau bouillante par mégarde. Ce que nous ne parvenons à comprendre aujourd’hui est comment est-il possible de mettre les deux pieds dans une casserole d’huile bouillante ? Un à la rigueur, cela est compréhensible : une casserole d’huile bouillante est dans la cour de la maison, la mère de notre mère qui ne l’y a posé met un pied dedans parce qu’elle ne l’a pas vu ; mais comment est-il possible alors d’y mettre le deuxième  (pied, bien sûr)? Pourtant, dans notre souvenir, la mère de notre mère avait bien des traces sur les deux jambes.
La mère de la mère de notre mère est morte en changeant une ampoule. La mère de notre mère nous racontait qu’elle avait grimpé sur une table tabouret à trois pieds assez courante dans les mobiliers bretons à moins que normands, avait dû faire une mauvaise chute et qu’elle avait été retrouvé plus tard. Nous ne souvenons plus si elle avait du se casser les hanches et dès lors ne plus pouvoir bouger et mourir en attendant ou si tombé sur la tête retrouvé dans la mare de son sang. La mère de notre mère disait qu’elle avait bien prévenu sa mère qu’elle devrait réparer ce tabouret table trépied dont un pied était bien chancelant. Ce qui nous paraît surprenant aujourd’hui est la possibilité d’aussi mal tomber d’un simple haut tabouret ? [..mais ce n'est pas du tout cela, c'est une histoire de lampe à huile avec contrepoids, et le contrepoids lui est tombé sur la tête, enfin un truc comme cela, à peu près, je crois, je ne sais plus ...]
La mère de notre mère nous racontait souvent en riant qu’elle avait essayé de nous tuer par deux fois. La première fois alors qu’elle se trouvait chez nos parents dans les Alpes, elle décida de nous descendre de la chambre au salon, nous porta dans nos langes et s’arma dans l’autre main d’une paire de ciseaux nécessaire à ses ouvrages de couture. Elle perdit l’équilibre dans l’escalier et dans sa chute nous planta les ciseaux dans le dos. Nous n’eûmes qu’une blessure superficielle et à la place d’une cicatrice une tâche se présenta à l’endroit. Cette tâche fascinait le medecin de famille qui la mesurait afin de voir son évolution. Notre mère nous expliqua que cela était normal et nous montra la tâche en forme de Corse qu’elle portait au mollet. A sa deuxième tentative d’assassinat, la mère de notre mère se promenait avec sa fille soit notre mère, la fille aînée de sa fille soit notre soeur et nous-mêmes dans nos langes et une doudoune sur une luge, la mère de notre mère bien sûr lâcha la luge dans une pente afin que nous puissions dévaler et glisser jusqu’à un tas de neige qui nous accueilla avec bienveillance quoiqu’indifférence.
Notre mère nous racontait souvent qu’alors bébé et effrayée par les bombardements de la guerre d’alors sa propre mère l’avait retrouvée un matin le visage tout griffé, notre mère nous expliquait alors qu’elle s’était griffée elle-même le visage dans la nuit tellement elle aurait eu peur. Ce que nous ne parvenons à comprendre aujourd’hui est comment un bébé peut donc bien se griffer le visage ?
Avec cette possible tentation de l’étrange de vouloir que ces histoires qui nous étaient colportées nous parlaient d’autre chose alors que bien sûr pas du tout.

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