Les années 90

Dans les années 90,
A.me demanda au cours d’un repas après un spectacle dans une ville du centre de la France où devait se dérouler un festival si je ne trouvais pas que le milieu de la danse contemporaine était trop cosanguin  et qu’ainsi les critiques qui paraissaient dans les journaux n’étaient nullement objectives mais reflétaient surtout une sorte d’état de l’opinion  d’un micromilieu colportant des rumeurs et des avis de personnes influentes pour de  tout autre raison que la danse elle-même. Nous étions attablé dans une salle attenante d’une salle de restaurant et se trouvaientt là mélangés des critiques, des chorégraphes, des programmateurs, des agents, des danseurs, cependant pour moi, l’aménagement de la salle me faisait tellement penser à une cantine, ce n’était dans mon esprit qu’une sorte de prolongement de la vie collective connu à l’internat ou au campus et je n’y voyais pas exactement la même chose que lui et j’attendais en général avec délectation les moments de bascule où l’ivresse et la fatigue aidant la folie dyonisienne s’emparerait de la place. Mais c’est peut-être lui qui avait raison, nous étions censés être devenu grand.  Je ne sais plus ce que je lui répondis ce soir-là. Je suis pourtant pratiquement sûr de ne pas lui avoir parlé de ce que les journaux ne sont que le reflet d’une géographie des informations et non des événements réels ainsi que nous l’avait appris notre professeur de sociosémiologie qui, à la fin des années 80, à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon, nous passait les vidéos de Godard des années 70, nous parlait de l’homme neuronal et des flux communicationnels dans un jargon sophistiqué qui nous paraissait des plus obscurs. Ce type, monsieur LAMIZET si notre mémoire ne nous joue des tours dont elle a le secret, aurait très bien pu parfois avoir les yeux révulsés et blancs tel Tirésias sans que cela ne nous étonnasses vraiment  puisque nous parlant véritablement d’ailleurs, comme s’il voyait le monde à venir qui se profilait devant lui et qu’il tentait de nous le décrire, ce qui  l’empêchait dans le même temps de nous voir dans la salle de cours où selon les apparences physiques  il était censé se trouver. Bien sûr, puisqu’à l’époque nous ne savions pas ce que le monde deviendrait et qu’internet n’était même pas une utopie, ses propos nous paraissait « fumeux ».
Je suis également pratiquement sûr de ne pas lui avoir parlé de la grande mince madame Gilberte COURNAND qui était je crois une grande critique de danse classique sans doute après avoir été danseuse elle-même et que j’avais rencontré en l’an 90 et où plus d’un s’interrogeait de ce qu’elle pouvait bien voir des spectacles puisqu’elle était devenue quasi aveugle dans la vie pratique. Le corps a pourtant ses mystères et il était cependant possible de s’imaginer qu’elle voyait parfaitement ce qui se passait sur les scènes de danse à l’exclusion de tout le reste. Une personne m’avait fait remarqué, à l’époque, qu’il y aurait sans doute une histoire parallèle de la danse contemporaine à écrire sur les corps réels des personnes des métiers hors scène et notamment sur la surréprésentation statistique et la grande influence des femmes très grosses dans le milieu de la danse contemporaine de l’époque. G me raconta que C. quant à lui afin de vérifier sa propre théorie sur l’étroitesse du milieu de la danse contemporaine avait choisi de lancer une rumeur selon laquelle Karine Saporta sortait avec Florence Arthaud afin de pouvoir compter le temps que mettrait ce bobard à lui revenir : je ne sais plus s’il attendit quinze jours, trois semaines ou un mois.

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