Papy MEUJOT et la consolidation de la modification.
Papy
MEUJOT lisait le journal et notamment l'interview par une journaliste
d'une dame présentée comme philosophe et dramaturge au sujet d'un
traité des bons sentiments qu'elle aurait écrit (cf. l'interviewlà). Papy MEUJOT trouvait les propos échangés complétement
débiles mais il se garderait bien de le dire à qui que ce soit.
« Bien sûr, cela ne donne aucune indication sur la valeur
du livre dont elles parlent, » se
disait Papy MEUJOT. En effet, combien d'élèves ont été
éloignées des livres de littérature ou de philosophie par les
cours censés leur en parler ? Combien de prof de français
névrosés n'ont pas su dire à leurs élèves « Je ne
saurais rien vous en dire puisque c'est à vous de vous y coller, de
les lire et d'y trouver ce qui vous concernera. » afin de
leur permettre de se jeter à l'eau et de lire ? Combien de prof
n'ont pas eu le courage de dire à leurs élèves qu'il ne pourrait
que leur raconter des histoires et des anecdotes au sujet des livres
en question mais que tout cela n'est rien, même pas pipi de chat,
car il faut qu'eux, êtres en devenir, trouvent les livres qu'ils
doivent lire. ? Combien de prof de philo n'ont pas eu le courage
de venir faire cours en toge en laissant SOCRATE s'emparer d'eux afin
de le laisser dialoguer librement avec la jeunesse attentive?
« Quel gâchis ! » marmonnait Papy MEUJOT.
Papy
MEUJOT ne comprenait pas l'interview de la dame au sujet de son
traité sur les bons sentiments « Apparemment, la dame se
situe dans une histoire de la langue et étudie l'évolution de
l'expression « bons sentiments » mais à aucun moment
n'est cité, par exemple, au hasard, l'expression « l'enfer est
pavé de bons sentiments. » ! » Papy MEUJOT mit
un certain temps à élucider d'où venait la gène qu'il éprouvait
à l'égard des propos de l'une ou de l'autre damoiselle au sujet des
« bons sentiments ». « La difficulté, et
spécialement en terme de morale, est bien qu'entre les mots et les
choses il y a un monde, une langue et un corps ! Sans parler
même des mondes, des
langues et des corps !
Lorsque qu'une personne parle de « bonté » à une autre,
il y a fort à parier qu'elles ne parlent pas de la même chose.
C'est bien la peine de se dire philosophe et dramaturge si ce n'est
pour convoquer la scéne comique du langage avec ses trappes, ses
décors peints en trompe l'oeil et ses cintres d'où il est possible
de faire croire s'être envolé tout en continuant à regarder la
scène... » Mais à mesure que Papy MEUJOT retrouvait le
fil de ses idées, il entendait déjà les pies jacasser et lui dire
« tu as mauvais esprit ! ». « Non,
disait-il aux pies, il faut avoir connu les déserts arides où
les mots et les paroles s'évaporent aussitôt, les régions des lacs
gelés où les paroles se figent et les mots se brisent, les couloirs
venteux qui arrachent toutes paroles avant même qu'elles aient pu
sortir de la gorge, toutes ces régions hostiles où le corps reste
nu et l'homme dépourvu. Et tous ces pays en guerre où chaque parole
blesse et où les mots sont flêches. IL FAUT AVOIR TRAVERSÉ
TOUT CELA POUR SAVOIR CE DONT IL EST PARLÉ ! » Papy
MEUJOT hurlait alors que les pies s'étaient déjà envolées. Il
trouva aussitôt son emportement et son emphase ridicule et
inapproprié. « Je ne devrais pas dire de telles choses. Ce
n'est pas ainsi. »
Papy
MEUJOT alla donc se promener pour respirer et tenter de reconnaître
et nommer toutes les plantes qu'il croiserait le long du chemin. «
Je suis terriblement superficiel, pensa t'il soudain. »
Et cette pensée le rasséréna.
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