Les années 80 : le stage à FR3 Nice Biot (suite)
J'étais
allée dîner ce samedi soir chez le frère du mari de la sœur de ma
mère qui m'avait pistonné pour un stage non rémunéré et
d'observation à FR3-Nice-Biot (cf. un épisode précédent) Le
type était sympa, il avait une deuxième femme dont il était
amoureux et réciproquement, ils avaient un jeune garçon mais
l'homme était atteint d'une maladie dégénérative de peut-être
les nerfs et se savait condamné. Cela créait une atmosphère très
particulière, comme d'être dans une maison où la mort a une
chambre d'ami. J'avais ressenti comme une attente de leur part à mon
égard, comme si j'aurais du leur dire quelque chose, leur porter une
parole, leur expliquer pourquoi alors qu'ils se sont trouvés, ils
devraient à nouveau se séparer. Tout cela me semblait beaucoup trop
grand et lourd pour moi. Je ne me souviens pas des propos tenus ce
soir-là, je me souviens de cette femme amoureuse qui ne comprend
pas. Ensuite, pour une raison qui m'échappe aujourd'hui, j'étais
allée dormir chez Valérie H. qui était jeune journaliste à la
rédaction de FR3-Nice-Biot. Là , pour une raison qui m'échappe
aussi, se trouvait un autre jeune journaliste qui dormait déjà.
Valérie a téléphoné au cours de la nuit parce qu'elle était à
Sanary où elle tournait en voiture depuis des heures à la recherche
de sa bande de potes qu'elle ne les trouvait pas. Je me suis
rappelée que le week end précédent (cf. un épisode précédent)
j'avais discuté avec un type de la bande qui m'avait expliqué ne
pas être de la bande mais être en vacances à Sanary dans une
maison en dur appartenant à ses parents, les autres faisant du
camping. Je m'étais même souvenu de son nom et avais dit à Valérie
de le chercher dans l'annuaire. En effet à cette époque, il y
avait, dans les rues, des cabines téléphoniques avec des annuaires
dedans, même si bien souvent les annuaires avaient été volés ou
détruits par pur vandalisme. Nous avons du échanger deux trois
paroles convenues avec le journaliste puis nous nous sommes
rendormis. Ce n'est qu'aujourd'hui que je me rends compte que la
situation aurait pu être génante, mais j'étais tellement habituée
à vivre en collectivité, à dormir ici ou là et de plus à cette
époque, le sommeil m'aimait, je le trouvais toujours rapidement. Le
lendemain, le type s'est réveillé tôt, il s'est douché, a pris
son petit déjeuner et nous avons du parler un peu avec lui depuis
notre lit d'appoint. Le type m'a dit que si je ne savais pas quoi
faire ce dimanche, je pouvais les accompagner lui et un autre
journaliste dont j'ai aussi oublié le nom, qu'ils repasseraient me
chercher en voiture deux heures plus tard, nous avons trouvé que
c'était une bonne idée et nous avons accepté. L'autre journaliste,
plus âgé, était aussi un peut-être vacataire, il se présentait
comme un journaliste Reporter d'images, il avait travaillé dans les
îles des DOM-TOM pour peut-être RFO et avait fait notamment un truc
comme « la boite noire à Saint-Pierre et Miquelon »
(ce n'est peut-être pas l'expression exacte). Nous sommes donc allés
à un concours de saut en parachutes : en rase campagne,
différentes équipes de peut-être huit à dix personnes sautaient
en parachute depuis un hélicoptère et devaient tomber sur une cible
dessinée au sol comme dans les jeux de fléchettes, l'équipe
récoltant le plus de points gagnerait. Il y avait aussi toutes
sortes de stands autour de grandes tablées en bois : saucisses
grillées, bière, vente de stocks d'habits de l'armée, vente de
livres et revues, chasse-pêche, légion étrangère, anciens
combattants, front national. L'atmosphère était assez bon enfant,
viril encadré par des femmes à poigne qui considèrent que leurs
bons hommes sont des gamins. A moins qu'elles ne le sachent. Après
avoir fait chacun leur tour en hélicoptère pour leur reportage, les
journalistes ont négocié que je puisse en faire un pour voir.
J'étais en robe et je me suis rapidement trouvé toute nue en raison
des masses d'air déplacées par les palettes et je n'avais pas
pensée tout de suite à plaquer mes mains sur ma robe. Ce qui de
toute façon, était vain. Arrivée dans l'hélicoptère, le pilote
m'accueillit avec un grand sourire. Il est toujours un peu gênant de
rencontrer un bel homme que vous ne connaissez pas et qui vient de
vous voir presque toute nue. J'ai essayée de m'échapper en
regardant à l'arrière où se trouvait derrière une grille huit à
dix hommes de l'équipe de l'armée de l'air qui m'ont souri
également. Le pilote a compris que j'étais une gourde et m'a
conseillé d'accrocher ma ceinture. Il a décollé. Là, j'ai compris
qu'il n'y avait pas de porte à ma droite et je ressentais toutes
sortes de sensations contradictoires entre l'hélicoptère qui
montait à pic, le bruit, les pressions. J'avais peur de regarder par
ma droite de peur de tomber. Il y a du avoir des conversations, des
paroles et des blagues échangées dont je ne me souviens plus, je me
souviens vaguement du paysage, de la politesse des garçons. Ce dont
je me souviens parfaitement, c'est lorsque l'hélicoptère s'est
stabilisé, que les hommes ont ouvert la porte de leur côté et ont
sauté dans le vide. L'hélicoptère ne faisait plus de bruit. Là,
soudain tout était calme, luxe et volupté. Les types sautaient dans
le vide avec une telle aisance et une telle joie que cela devenait
désirables. .Je me souviens du visage de l'un des militaires alors
que dans le vide dans une position de fœtus. Un sourire d'une paix
immense. L'expérience de la liberté. Puis nous sommes retournés au
sol. Lorsque des années plus tard, une chorégraphe qui travaillait
avec des cosmonautes et faisaient des vols antigravitationnels avec
eux, lorsque des années plus tard, une chorégraphe me raconterait
que la plupart des cosmonautes dépriment lorsqu'ils reviennent sur
terre, j'estimerais pouvoir le comprendre en repensant à ce moment
où dans l'arrière pays niçois, l'hélicoptère est redescendu, a
atterri, où je suis ressorti et ai marché sur la terre ferme.
D'éprouver cette nostalgie d'une intensité.
Après
il est possible que nous soyons allée faire un autre reportage, ou
que nous ayons déjeuner là-bas et attendu les résultats du
concours. Je ne me souviens plus. Il me semble que j'étais atterrée
par les auteurs et les titres des bouquins qui étaient vendus
n'ayant pas encore pris conscience du tas d'imbécilités discutables
qui déjà se trouvaient dans les coins livres des supermarchés et
il me semble que les journalistes m'avaient dit qu'il ne fallait pas
en faire un plat. Mais cette expression est d'ordinaire dans la
bouche de mon père. Et je regrette de ne jamais eu avoir la présence
d'esprit de lui demander de son vivant si je pouvais alors en faire
une cruche. Peut-être le lui ai-je dit d'ailleurs. Ma mémoire n'est
plus si nette. Plus impressionniste.
Il
y avait un trou dans l'emploi du temps et les journalistes m'avait
alors proposé de m'emmener à Monaco que je ne connaissais pas. L'un
des journalistes était un fan de formule un et nous avons je crois
tourner une ou deux fois dans le circuit officiel du Grand Prix de
Monaco, soit les routes de la ville elle-même Le type parlait des
virages comme un danseur parle de suite de pas dans un enchaînements.
Nous avons garé la voiture dans un parking souterrain et je me
souviens avoir ri devant des grands panneaux dessinés montrant côte
à côte un homme en maillot de bain barré et un homme habillé en
costume-pantalon : une tenue correcte était exigée pour se
promener en ville. La ville me semblait bizarre, un côté carton
pâte et dans le même temps, cela me rappelait la Suisse l'été. Je
me suis peut-être vaguement souvenue d'un garçon qui avait été
dans la classe de ma sœur dont la mère était agent immobilier à
Monaco. Les garçons voulaient m'emmener à l'hôtel de France pour
manger des pâtisseries. Dans une grande salle à atmosphère feutrée
comme dirait notre père, quelques vieilles dames discutaient devant
un thé et des pâtisseries. Ce n'est qu'aujourd'hui que je réalise
que pour notre père, ce genre d'endroits devait évoquer l'Hôtel
des Bergues, à Genève, où les moquettes épaisses et les rideaux
en velours n’atténuèrent que peu l'effroi de sa mère alors jeune
novice à peine sortie du couvent mais déjà jeune mariée
nouvellement violée par son mari lors de sa nuit de noces.
Un
monsieur en livrée blanche est venue avec un chariot dans lequel
nous avons à notre tour choisi des pâtisseries. Les garçons ont
pris des cafés et peut-être moi aussi. Je n'ai pas payé mais je me
souviens avoir vaguement vu des gros billets et peu de monnaie mais
les garçons n'ont pas voulu me dire.
Ensuite,
nous sommes rentrés à Nice ou peut-être m'ont-ils ramené
directement à Cannes où je logeais chez la grand-mère de C. avec
C. qui faisait un stage d'ingénieurs à Grasse. La grand-mère de C.
était partie quelques jours en vacances et des amis de C. étaient
là.
Puis
C. m'a engueulé parce que je ne l'avais pas prévenue que je ne
rentrerai qu'en fin d'après-midi. Et je me souviens ne même pas
comprendre de quoi elle me parlait. Ni même d'où elle me parlait.
[« Pourquoi
ai-je l'impression d'avoir déjà écrit ce texte se demandait Louise
à moins que
josettemanuellevictormartinemauricegeorgeslucyetlesautres ? »
]
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