Je me souviens très bien de ce jour-là. Ce devait être un
week-end des dernières semaines de septembre. Je faisais un stage au
service de presse de la biennale de danse de Lyon. Au début du
stage, une copine me « prêtait » la garçonnière de son
mec marié mais sa femme est au courant, et ensuite je déménageai
pour l’appart d’une autre copine. Bref, la copine, X. de son
prénom, m’avait dit « pour le téléphone, il faut un code,
laisser sonner trois fois, puis rappeler et là tu peux décrocher. »
Et ce matin-là, j’avais du oublier ou du moins cela devait me
casser les pieds de faire tant de mystères, donc je décrochais sans
cérémonial et une minette me hurlait dessus en me demandant sans
cérémonial ce que je faisais dans cet appartement. Comme je lui
demandais qui elle est, et qu’elle m’expliquait qu’elle était
la femme du mec marié mais sa femme est au courant, je lui
expliquais que j’étais une copine de X. La minette dit qu’elle
voit alors qu’elle entendait et raccrocha. La minette dit alors
qu’elle voit bien qu’entendant, puis raccrochit. Puis, alors que
m’empressant d’empaqueter puisque déménageant, le mec marié
mais sa femme est au courant téléphona et m’engueula de ne pas
avoir suivi les protocoles pour répondre au téléphone. Je lui
répondis que je ne voyais pas où était le problème puisque sa
femme est au courant, puisque sa femme était au courant. Il
m’expliqua alors que X. n’avait pas dû tout me dire, qu’il
allait venir pour le déménagement
afin qu’il
n’y ait pas d’histoires, puis avant toute conclusion, X.
avait du arriver, prendre la suite au téléphone, dire que
« l’autre » était en bas. Puis rapidement, moi et mes
paquets avons dû nous trouver au milieu d’une grande scène de
vaudeville avec la belle maitresse de vingt ans, la compagne de
trente ans sur le point d’être délaissée, le mec marié de
quarante ans ; ne manquait que la femme de quarante ans jamais
divorcé mais qui est au courant ; N’ayant aucun désir de
jouer ce rôle et n’ayant aucune raison d’ être là, je
les laissais jouer leur scène en prenant soin de dire à haute voix
« je laisse là MES affaires, je viendrai les chercher plus
tard » afin que la compagne de trente ans ne les jette pas par
la fenêtre de rage en les prenant pour celles de la belle maîtresse
de vingt ans pour laquelle la délaisse le mec marié de quarante ans
qui avait quitté sa femme il y a dix ans pour ses chairs plus
fraîche. Les laissant à leur situation, j’allais dans l’autre
appartement et en chemin, je tombais sur G. , dans tous ses
états, qui m’expliquait qu’elle avait eu une aventure, qu’elle
avait repris avec W., qu’elle ne savait plus trop où elle en
était, etc… Avec le recul, peut-être devrais-je men vouloir z’un
peu, la vie de G. s’est peut-être joué à ce moment-là, mais je
ne
pouvais pas vraiment la
guider ce jour-là. Je venais de m’éclipser de la scène de l’acte
trois d’un vaudeville et me trouvais de suite embarqué dans
une scène intime de confidence dans une pièce que j’identifiais
mal (sans doute parce que les références étaient là
cinématographiques) et parce que je ne pouvais m’empêcher de
réfléchir à comment faire pour m’habiller les jours prochains si
la compagne délaissée de la précédente pièce décidai pour se
venger de brûler mes affaires dans une sorte d’acte nihiliste
puisque mes affaires n’avaient aucun rapport
avec les siennes. J’aurais aussi pu dire abruptement à
G. « je ne sais pas de toute façon comment tu fais pour
sortir depuis si longtemps avec W. » mais ce genre de phrases
ne venait pas à mon esprit puisque
nous
n’avions pas le droit de nous mêler directement des affaires de
cœur des autres. J’ai du lui dire des phrases comme
« toi, seule, sais ce qui est bon pour toi. » ce qui
d’ailleurs sous ses airs de phrases bateau est une phrase d’une
terrible justesse.
Bref, après cette journée, je ne pouvais m’empêcher de penser
que toutes ces personnes, assurées de savoir où elles dormiraient
le soir même et de pouvoir téléphoner à leurs parents pour les
sortir d’embarras en cas de pépin, bref, que
ces
personnes-là se la jouaient, qu’elles avaient des
problèmes qu’elles ne soupçonnaient pas d’être annexes, non
connexes ; Jusqu’à ce que je comprenne que c’ est chose
plus simple et donc complexe pour d’autres raisons, en raison des
façons et de
l’interdiction,
chose bien plus simple que cela ne me l’apparaissait,
parce que tout en l’étant déjà, et donc complexe que cela ne
l’était, n’aurait pu l’être, ne le serait puisque déjà
là. Parce que d’abord, il n’est nullement sûr que le verbe
« aimer » soit un verbe transitif. Mais cela, nous le
savions déjà.
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