Papy MEUJOT passe son master II à l'Université.
Papy MEUJOT revenait en train de la forêt de
Fontainebleau où il avait passé la journée. « Quoi de mieux
que marcher en forêt pour préparer son être à recevoir et se
confronter à de la connaissance ? » s'était dit Papy
MEUJOT pour se rassurer. A la vérité, il trouvait de plus en plus
difficile de suivre les cours de son master II : « les
professeurs qui sont censés nous enseigner ont tous l'air de puceau
de la connaissance, le cuir de leur peau n'est pas tanné, que
peuvent-ils donc avoir la prétention de nous apprendre ? »
avait confié Papy MEUJOT à Josette, la fille de son ami Victor, qui
menait une carrière d'espionne rousse du réel. « Mais PAPY
MEUJOT !, lui avait rétorqué Josette, tu as cent-trente ans et
bientôt cent-trente et un ! Comment veux-tu que des petits
minets de quarante ans t'apprennent quoi que ce soit ? »
Papy MEUJOT n'était pas d'accord avec cette conception, le mystère
de la connaissance n'est pas une affaire d'âge et le plus jeune peut
enseigner le plus âgé. Pour l'heure, dans le train, l'intérieur de
son corps encore tout rempli de feuillages, de sous-bois, et de rayons
de lumière s'infiltrant, il parcourait le journal Libération
daté du 24 février 2015. Après la lecture en diagonale d'un
article écrit par un monsieur qui avait tenu à se présenter comme
un professeur d'anglais en classe préparatoire au lycée Henri IV,
article dont le contenu avait semblé confirmer à Papy MEUJOT que
quelque chose manquait dans l'éducation de ces jeunes messieurs
(Papy MEUJOT avait plaint les jeunes du lycée Henri IV d'avoir comme
professeurs des crétins prenant HOUELLEBECQ comme maître à penser
soit un ex-alcoolique ayant construit une œuvre autour du problème
de la taille de la bite donnée une fois pour toutes par la Nature),
Papy MEUJOT lut une chronique d'un jeune économiste chouchou des
médias internationaux. Papy MEUJOT avait beaucoup entendu parler de
l'ouvrage de ce jeune homme intitulé peut-être « LE CAPITAL
au XXIe siècle » en clin d’œil à l'ouvrage de son illustre
collègue du XIXe siècle, Karl MARX et sa sœur Angèle. Toutefois,
l'ambition politique de l'ouvrage du sieur PIKETTY qu'avait parcouru
Papy MEUJOT ne lui était pas apparu clairement. Josette, quant à
elle, avait trouvé l'ouvrage timoré, « c'est un ouvrage pour
universitaires et journalistes qui feront des discussions et des
conférences à l'infini et seront content d'eux-mêmes»
avait-elle dit. Toutefois, Papy MEUJOT avait lu dans le journal Ouest
France qu'il avait lu au Mac Donald's alors que dans sa campagne
un rapide insert racontant qu'un directeur d'une grande entreprise
aux Etats-Unis avait décidé d'augmenter le salaire de ses ouvriers
suite à la lecture de l'ouvrage du jeune PIKETTY, toutefois, cette
brève ne mentionnait ni ville ni nom de directeur ni nom
d'entreprise et Papy MEUJOT reniflait une bonne vieille rumeur
édifiant du légendaire. Puis, dans le même journal, Papy MEUJOT
avait lu que la chaîne américaine de distribution alimentaire
WALLMART envisageait également d'augmenter ses salariés. L'article ne
mentionnait pas l'ouvrage de PIKETTY mais la prise de conscience des
équipes dirigeantes de la nécessité de mieux payer leurs
personnels. « Ils avaient du remarquer que leurs salariés
achetaient de moins en moins de produits chez eux et que cela
créait un manque à gagner ! c'est du fordisme ! mes premiers clients sont mes ouvriers, il faut qu'il gagne assez pour acheter mes voitures ! rien de nouveau sous le soleil ! », avait dit Josette et Papy MEUJOT ne
regrettait plus de ne pas avoir d'enfants : leur lucidité à
moins que leur simple désenchantement lui semblait atroce à
supporter. L'article que Papy MEUJOT lisait dans le train qui le
ramenait de la forêt vers la capitale évoquait l'ouvrage écrit par
la peut-être femme du jeune économiste relatant les nouveaux
modèles économiques possibles pour les médias, l'article parlait
de dépasser les modèles actuels où le pouvoir des médias est
concentré dans les quelques mains de riches entrepreneurs, et
l'article de détailler tout un blabla sur les financements
participatifs et le blabla qui va avec les innovations des nouvelles
technologies tout en donnant des détails techniques sur la
composition du papier toilette qui seront utilisés dans les
toilettes des nouveaux médias, Papy MEUJOT était déjà en train de
s'endormir en lisant pour la nième fois blabla les apports de l'âge
du numérique quand il trébucha sur la phrase : « Cela
(soit les apports en capital ne donnent pas lieu à des dividendes
mais à des droits de vote) permettra d'encourager le financement
participatif (crowfunding), tout en dépassant une certaine illusion
égalitariste qui a miné nombre de sociétés de rédacteurs et de
structures coopératives dans le passé. Il est en effet normal que
la personne qui met 10 000 euros ait plus de pouvoir que celle qui
met 1 000 euros, et que celle qui en met 100 000 euros en ait plus
que celle qui en met 10 000 euros. Ce qu'il faut éviter, c'est que
les personnes qui mettent des dizaines ou des centaines de millions
d'euros disposent de tous les pouvoirs. » Puis l'article
continuait en précisant le détail du réglage de la chasse d'eau
des toilettes des
nouveaux médias. Papy MEUJOT eut une pensée émue
pour monsieur Pierre BERGE qui finançait le journal LE MONDE comme
d'autres en leur temps une danseuse tout en exprimant sur TWITTER tel
un amoureux déçu ses désaccords avec les choix éditoriaux. Papy
MEUJOT eut la sensation de comprendre pourquoi ce jeune économiste
était invité sur tous les campus universitaires américains :
« Il est en effet normal que la personne qui met 10 000 euros
ait plus de pouvoir que celle qui met 1 000 euros et que celle qui en
met 100 000 euros en ait plus que celle qui en met 10 000 euros. »
Cet économiste pense selon les normes du « rêve américain »,
Cet économiste n'est pas de gauche politique contrairement à ses
dires. « C'est peut-être cela qui manque dans l'éducation de
ces jeunes garçons, à force de penser qu'il est normal que celui
qui peut payer plus ait plus de pouvoir que les autres, alors viendra
le temps où il sera aussi normal que ceux qui n'ont que leurs poings
les leur fichent dans la gueule. » Le train était arrivé à
Paris et Papy MEUJOT descendit du train le cœur lourd. Il vit alors
les nuées d'oiseaux nichés dans les structures de la gare qui le
regardaient. Il respira et retrouva sa joie. « Et dire que ces
imbéciles prétendent proposer un nouveau modèle économique alors
qu'ils réintroduisent en cheval de Troie dans la pensée politique
le suffrage censitaire ! » Et Papy MEUJOT laissa échapper
un rire tonitruant. Il n'y a pas de meilleur vaccin.dans les épisodes précédents
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