Martine et la dimension de la farce,

Martine regardait une vidéo : « ...à un moment dans votre spectacle, de la gnare sort de votre nez et vient faire corps avec un postillon dans une vertigineuse chute au sol. Est-ce que l'on peut considérer ce micro-événement comme un contre-point stylistique au dispositif narratif mis en place dans la mise en scène figée par des costumes en métal ? Cette question est intéressante ... » Cela faisait la nième vidéo de rencontre publics-auteurs que Martine regardait qui démarrait par une question qui apparaissait à Martine comme complétement débile et qui était reçu par un « c'est une question intéressante ». Martine, qui regardait ces vidéos dans le but d'y voir les extraits des spectacles insérés, se demandait si cela était devenu une sorte de nouvelle convention, l'exercice de la rencontre avec les auteurs étant un exercice des plus artificiels, pourquoi ne pas aborder le truc carrément avec une question hyper débile, histoire de ne pas être dupe. Dans les années 90, Martine en avait soupé de ces rencontres entre les publics et les artistes mais à cette époque, les rencontres étaient plutôt présentés comme « avec le public » et les questions émanaient de personnes dans le public. Et systématiquement un type ou une nana expliquait « ne pas avoir les clefs pour comprendre le spectacle » . Jamais à sa connaissance, un chorégraphe n'avait alors sorti un trousseau de clef et dit « voilà les clefs du spectacle ! Si vous voulez, je vous les prête ! » Avec le recul, Martine pensa qu'il devait s'agir d'une sorte de conditionnement psychique : être conditionné à croire qu'il y a besoin de clefs pour ne pas voir qu'il n'y a même pas de porte. Martine se souvenait qu'elle aurait aimé organiser une sorte de « rencontre avec les publics » mystification où les personnes sur scène et des faux publics auraient tous dit des trucs hautement débiles mais habillés dans du charabia savant afin de voir à quel moment du « vrai » public s'énerverait, s'en irait, crierait au scandale,etc.... Une sorte de test de Milgram non par pour tester l'autorité de la science, mais l'autorité de l'art.
Mais, bon cela aurait été en quelque sorte cracher dans la soupe ou caricaturer un peu trop ce qui se faisait déjà sans volonté de faire rire . D'ailleurs à la même époque, Martine était loin de se douter que la farce avait pris des dimensions bien plus gigantiques dans le domaine de l'économie politique : « Je vous crée un indicateur bidon pour agence de notation ou je cherche un concept creux à marteler dans les médias ? » Puis Martine pensa à la farce dont on remplit les dindes. Noël approchait sans pas.

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