J'ai retrouvé ce que
je voulais dire tout à l'heure avant d'être interrompu par je ne
sais qui ou quoi qui ne voudrait pas que j'arrive où que ce soit ou
à quoi ou qui que ce soit. Donc je voulais parler de la peinture
qui doit se faire en regardant le réel soit des personnes ou
des choses qui posent dans l'atelier, le monde de dehors ( hors
l'atelier) que je regarde et que je retranscris en dessins ou sur
toile, mais je dois dans la mesure du possible ne pas travailler à
partir de déjà représenté : si je travaille depuis une
photographie ou si j'utilise une camera obscura, je perds ce quelque
chose qui fait que précisément c'est moi qui regarde, disons
depuis moi. Par analogie, on peut aussi dire pour Picasso que ces
tableaux sont plus intéressants lorsqu'il travaille depuis sa chose
mentale, depuis ses souvenirs de perception ou depuis ce que sa main
décide de dessiner que depuis des déjà représentés comme dans
le tableau « les femmes d'Alger » par exemple.
Ce serait une des
raisons de la maladie de cet historien d'art dont le nom m'échappe
pour l'instant est qui a fait un séjour chez les fous. [
aby warburg]
Ah, ouais, le mec qui
avait dérapé et se croyait responsable du déclenchement de la
première guerre mondiale.
Et alors ce serait quoi
la raison ?
Ben, qu'il travaillait
trop à partir des images …
Bref, je dois pour
représenter toujours me tenir à la lisière pour retrouver le
point où l'informe devient forme. Si je travaille depuis du déjà
formé, j'escamote le travail et je ferais circuler des
contrefaçons.
Et quel rapport avec
aujourd'hui ?
Ben, si , aujourd'hui,
il n'y a presque plus que des contrefaçons, les arts sont enfermés
entre eux et se regardent les uns les autres et le nombril.
Ouais, je ne sais pas
trop, regarde ou plutôt écoute quelqu'un comme Christine and the
Queens, ben c'est sûr que la miss elle travaille depuis tout ce
qu'elle a entendu et vu dans les arts, dans les chansons, au
cinéma, etc... Je peux me gourer mais je serai assez persuadée que
la miss a vécu plein de trucs au travers d'oeuvres musicales et
autres et que ses chansons et sa façon de les chanter en les
articulant dans une sorte de chanson de geste inspiré de Michaël
Jackson restituent cela, ce vécu par procuration.
Mais est-ce que cela
n'est pas du kitsch précisément ?
Peut-être...
Je crois comprendre ce
que vous dîtes : dans la tête des jeunes c'est comme le truc
que préparerait Casimir dans l'île aux enfants, il y a un tas de
trucs mélangés de toutes les représentations qu'ils ont vu ici ou
là et cela fait un gros goulbi goulba qu'ils dégueulent ensuite à
leur tour sous forme d'oeuvres mais cela ne passe pas par la case
vécue, cela manque alors de chair et de vécu personnel.
Je voudrais vous faire
remarquer que nous pédalons allégrement dans les généralités
les plus vaseuses, là …
Il ne faut pas avoir
peur de traverser la vase, il faut juste essayer de ne pas y rester
englouti(e).
T'es sûre que c'est
« goulbi goulba » le nom de la recette de Casimir ?
Ce n'est pas plutôt « gloupi goulba » ? Ou
« goulbigoupla » ou « gloubiglouba » ?
Et vous vouliez parler
de la télévision....
Ah ouais, voilà, c'est
cela ... les personnes qui font la télé de nos jours ont eux-mêmes
beaucoup regardé la télévision et donc t'as les gens qui veulent
passer par le moyen qu'est la télévision pour montrer et dire et
ceux qui veulent faire de la télévision comme ils avaient vu à la
télé avant d'en faire.
Je ne comprends pas.
Moi non plus.
J'ai un de ses mal(s)
de crâne...
Un mal de vanité ?
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